Digisol
Un projet d’autoconsommation collective utilisant la blockchain
- Thème(s) : Autoconsommation Infrastructures et technologies
- Localisation : Occitanie
- Avancement : Expérimentation en cours
Les technologies de blockchain sont mises en avant aujourd’hui comme un moyen de réorganiser les systèmes économique et énergétique via des flux financiers et physiques à l’échelle locale gérés par des transactions directes entre individus, communautés et organisations.
Les technologies de blockchain liées à l’énergie sont encore à l’état de prototype ou d’expérimentation. S’agissant de l’électricité, l’intérêt des blockchains est reconnu pour la tenue de registres et l’automatisation d’actions via des programmes autonomes, dits smart contracts. Par ailleurs, de nombreux acteurs du marché de l’énergie étudient l’utilisation des blockchains en appui de la mise en place d’un système électrique totalement décentralisé. Cela pose des questions complexes sur la coexistence de systèmes centralisés et décentralisés et sur l’interaction entre les acteurs de ces différents systèmes.
En France, les cas d’usage autour des échanges d’électricité renouvelable pair-à-pair, dit Peer-to-Peer, semblent à ce jour se concentrer autour de l’autoconsommation collective et de la mise en œuvre de la réglementation relatives aux communautés énergétiques (notamment, la Loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, qui transpose le paquet législatif de l’UE « Une énergie propre pour tous les Européens », introduit la notion de « Communautés d’énergie renouvelable » et de « Communauté énergétique citoyenne » ).
Le département des Pyrénées Orientales s’est engagé dans une démarche de « Territoire à Énergie Positive », qui se traduit notamment sur le terrain par le démonstrateur DIGISOL. Basé à Perpignan et co-financé par l’ADEME dans le cadre du Programme des Investissements d’Avenir, DIGISOL expérimente l’autoconsommation collective. Dans ce cadre, la société Sunchain accompagne le Conseil départemental pour la définition de la répartition de la production entre les consommateurs. Trois sites ont déjà été identifiés pour mener cette expérimentation qui utilise la technologie Hyperledger, une plateforme privée de développement de la blockchain portée par la fondation Linux. À terme, jusqu’à 1 000 sites pourraient être équipés au sein du projet DIGISOL.
Le graphique, ci-dessus, décrit les principales étapes de la solution développée par Sunchain :
- Sunchain connecte un micro-ordinateur à la sortie Télé-Information Client (TIC) de chaque compteur évolué Linky des clients de l’opération d’autoconsommation collective et du/des sites de production photovoltaïque.
- Ces micro-ordinateurs récupèrent à chaque pas de temps les éléments de courbe de mesure de la consommation et/ou de la production du compteur et les partagent avec la blockchain privée.
- Le réseau de nœuds de la blockchain privée calcule à chaque pas de temps les taux de répartition par client entre production locale autoconsommée et consommation fournie par le fournisseur de chaque client.
- Sunchain partage avec Enedis à fréquence régulière les taux de répartition.
- Enedis combine la relève des courbes de charge des compteurs de chaque client avec ces taux de répartition pour le calcul des courbes de charge de l’autoconsommation, de la fourniture de complément par le fournisseur et, le cas échéant, du surplus réinjecté sur le réseau public de distribution.
- Enedis transmet les informations de facturation à la personne morale organisatrice de l’opération d’autoconsommation collective pour la production autoconsommée et aux fournisseurs et responsables d’équilibre pour la fourniture de complément et, le cas échéant, le surplus de production.
La source de données de confiance est dite « oracle » dans le vocable blockchain : elle est l’interface entre le monde physique du système électrique et le monde numérique d’une blockchain. Dans ce cas précis, l’« oracle » est l’infrastructure de comptage et, plus particulièrement, l’infrastructure Linky à partir de laquelle deux flux de données sont disponibles :
- d’une part, celles relevées à partir de la TIC du compteur ;
- d’autre part, celles issues des systèmes d’information d’Enedis (données certifiées utilisables par les acteurs du marché).
Dans le cadre du projet DIGISOL, Enedis interface ses systèmes avec la blockchain pour recueillir le bilan de la répartition des flux. Ce partenariat entre Sunchain et Enedis permet aux consommateurs de l’opération :
- de se voir affecter à chaque instant leur quote-part de production locale telle que calculée via le protocole blockchain ;
- d’être alimenté en électricité, même en absence de production, via le réseau public de distribution ;
- de valoriser le surplus de production non autoconsommé ;
- de profiter d’une alimentation en électricité de qualité, stable en tension et fréquence, via le réseau public de distribution ;
- de disposer de données fiables, sûres, certifiées par Enedis ;
- de garder la liberté de choisir son fournisseur d’électricité pour l’électricité non autoproduite.
Enedis a développé un format de données disponible pour tous les acteurs qui souhaitent mettre en œuvre ce type de projet d’autoconsommation collective utilisant les blockchains pour définir leurs coefficients de répartition. Du point de vue d’Enedis, standardiser ce format de données et l’interface entre les systèmes d’informations (SI) d’Enedis et les blockchains est essentiel afin de faciliter le déploiement industriel de ces solutions.
Conscient de l’évolution rapide de ces technologies qui peuvent passer du stade de prototype à celui de la commercialisation en quelques années, Enedis accompagne les porteurs de solutions innovantes, y compris celles utilisant des blockchains. L’objectif est de développer des interfaces standardisées avec les services de données énergétiques certifiées et de référence d’Enedis. C’est l’occasion pour Enedis de conforter son rôle de tiers de confiance pour les données énergétiques, aussi appelé « oracle » pour les solutions utilisant des blockchains.