Les effacements de consommation en 3 minutes
Pour conserver un équilibre entre électricité produite et électricité consommée, les consommateurs peuvent être sollicités pour réduire ou reporter leur usage de l’électricité pendant les périodes de forte consommation. C’est ce qu’on appelle des effacements de consommation. En quoi consistent-ils ? Qui en sont les différents acteurs ?
Un outil d’équilibrage entre production et consommation d’électricité
Le bon fonctionnement du système électrique repose sur le maintien de l’équilibre entre la quantité d’électricité produite et la quantité consommée. Pour y parvenir, il faut pouvoir adapter la production et/ou la consommation électrique à différentes échéances.
Du côté des producteurs, la flexibilité est d’abord assurée par des moyens de production dits « pilotables », c’est-à-dire qui peuvent moduler leur production. C’est le cas des centrales électriques nucléaires, fossiles et hydrauliques. Or, ce sont des moyens de production fossiles.
Afin de réduire les émissions de dioxyde de carbone dans la production électrique, il est essentiel que les consommateurs puissent également participer à cette modulation. Le 5 juin 2019, la Commission Européenne promeut les « effacements » dans la directive (UE) n°2019-944 issue du paquet dit « énergie propre ».
Ces effacements consistent à solliciter les consommateurs à diminuer ou reporter leur consommation électrique sur certaines périodes.
La France est pionnière dans la mise en œuvre des effacements, qu’elle soutient à travers différents mécanismes dédiés. Elle affiche des objectifs ambitieux de développement de la filière dans sa programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE).
Il existe deux catégories principales d’effacements : les effacements tarifaires, où le consommateur est encouragé par des tarifs plus avantageux à reporter sa consommation sur certaines plages temporelles, et les effacements explicites, où le consommateur s’engage à réduire sa consommation durant une certaine période, et revend l’énergie « effacée ».
Les effacements tarifaires
Les effacements « tarifaires », aussi appelés effacements indissociables de la fourniture, rassemblent les offres des fournisseurs d’électricité comprenant des tarifs différenciés. Souvent à l’échelle d’une journée, les clients sont incités à reporter certaines consommations déplaçables (comme le chauffage des ballons d’eau chaude) à des périodes de tarification plus faible. Cela permet au fournisseur de réduire ses coûts d’approvisionnement, aux gestionnaires de réseau de limiter les tensions, et au consommateur de réduire le coût de sa facture.
L’exemple emblématique des effacements tarifaires est le fameux tarif « heures pleines/heures creuses ». Il consiste en un tarif plus élevé que la moyenne d’un tarif base pendant les heures pleines, mais moins élevé pendant les heures creuses, généralement entre 22h et 6h. Il permet de déplacer chaque jour plusieurs GW de consommation à une période moins saturée.
D’autres types de tarification plus évoluées existent, comme le tarif TEMPO qui sépare les jours de l’année en 3 groupes tarifaires différents en fonction du niveau de consommation électrique prévue. La tarification est très élevée les 22 jours par an où la consommation électrique française est maximale. En contrepartie, l’électricité est moins chère pour ces clients 300 jours par an. Durant les 43 jours restants, jours de consommation relativement importante en France, le tarif est similaire au tarif réglementé.
L’effacement tarifaire est aujourd’hui en perte de vitesse. Il souffre d’un manque d’intérêt économique pour les clients (en dehors des heures pleines/heures creuses). Mais de nombreuses opportunités se profilent pour le développement de nouvelles offres. Par exemple, l’arrivée des véhicules électriques, qui impliquent une forte consommation de courant. Ou encore le déploiement des compteurs Linky, dont les données permettent aux fournisseurs de créer des plages tarifaires plus nombreuses que les « heures pleines / heures creuses ». Les clients équipés de Linky peuvent observer leur consommation réelle et choisir l’offre la plus adaptée à leur quotidien.
Les effacements explicites
Pour les effacements explicites, le consommateur s’engage à diminuer sa consommation d’un certain niveau sur une période définie. L’effacement équivalent est ensuite vendu par un opérateur d’effacement (EDF, Engie, Enerdigit, Smartgrid Energie…) au gestionnaire du Réseau public de Transport d’Electricité (RTE) ou à un autre acteur de marché. Les consommateurs ne sont pas donc pas obligés de passer par leur fournisseur pour valoriser leur flexibilité.
Le mécanisme d’un effacement explicite est le suivant : l’acteur peut être soit le consommateur lui-même, soit un opérateur d’effacement. La seule condition pour être acteur est de disposer d’une capacité d’effacement suffisante. Pour valoriser la flexibilité des « petits consommateurs », comme les sites tertiaires ou résidentiels, les opérateurs d’effacement peuvent rassembler plusieurs consommateurs dans un même périmètre pour atteindre la capacité critique, à condition d’être capable de réaliser l’effacement en même temps chez tous les consommateurs du groupe.
Les effacements explicites peuvent être rémunérés de deux façons différentes :
- L’acteur peut revendre sa « capacité à s’effacer » à RTE, c’est-à-dire mettre à disposition sa capacité d’effacement. RTE pourra alors en faire différents usages : les incorporer aux réserves d’équilibrage, alimenter les systèmes d’échange d’obligations de capacité de la part des différents fournisseurs d’électricité…
- L’acteur peut également revendre l’énergie « effacée » (après l’avoir payée au fournisseur), soit sur les marchés, soit auprès RTE, comme s’il s’agissait d’une électricité qu’il avait lui-même produite.
Les gros industriels, qui disposent d’une capacité d’effacement importante et centralisée, représentent la majorité des effacements explicites réalisés aujourd’hui. Mais leur nombre est limité, et le potentiel de croissance de la filière réside plutôt chez des consommateurs plus petits, qu’ils soient industriels, tertiaires ou même résidentiels.