Présentation générale
L’autoconsommation peut être définie comme la possibilité pour un ou plusieurs consommateurs de produire eux-mêmes tout ou une partie de leur consommation d’électricité. On distingue l’autoconsommation individuelle, dans laquelle un consommateur produit lui-même l’électricité qu’il consomme, et l’autoconsommation collective, dans laquelle un ou plusieurs consommateurs s’associent avec un ou plusieurs producteurs.
1. Autoconsommation ou autoproduction ?
Les termes autoconsommation et autoproduction sont généralement employés indifféremment pour décrire le fait de consommer et produire de l’électricité en un même lieu. En toute rigueur, l’autoconsommation est le fait de consommer sur place tout ou partie de l’énergie produite par une installation, tandis que l’autoproduction correspond au fait de produire sur place tout ou partie de l’énergie consommée. Ces deux phénomènes sont quantifiés respectivement par :
- le taux d’autoconsommation, qui représente la part de production autoconsommée et qui est égal au rapport entre la production autoconsommée et la production totale du site ;
- le taux d’autoproduction, qui représente la part de la consommation du site assurée par la production locale et qui est égal au rapport entre la consommation autoproduite et la consommation totale du site.
La puissance maximale injectée sur le réseau par l’installation de production, lorsque la production excède la consommation, et la puissance maximale soutirée du réseau par le site de consommation, lorsque la production n’est pas suffisante, sont deux autres grandeurs qui dimensionnent et caractérisent une opération d’autoconsommation/autoproduction.
2. La dynamique de l’autoconsommation
Le principe d’autoconsommation dans le système électrique n’est pas nouveau puisque, d’un point de vue physique, les électrons mis en mouvement empruntent toujours le chemin le plus court. Ainsi, les flux d’énergie se dirigent en priorité vers le ou les points de consommation les plus proches. L’autoconsommation, dont il est question ici, correspond à la mise en œuvre de principes contractuels nouveaux permettant de prendre en compte le fait qu’une partie de l’énergie produite est consommée sur place.
L’autoconsommation constitue un phénomène encore marginal à l’échelle française : elle concerne selon Enedis environ 72252installations et ne représente que 0,29 GW sur les 8,4 GW de capacités photovoltaïques raccordées au réseau de distribution à la fin du premier trimestre 2020
Données régulièrement mises à jour par Enedis à l’adresse www.enedis.fr/open-data-le-mix-par-enedis
. Elle connait pour autant une dynamique forte : les installations en autoconsommation totale ou partielle représentent plus de trois quart des demandes de raccordements d’installations photovoltaïques en 2019. Cette dynamique pourrait par ailleurs perdurer voire être annonciatrice d’un développement à grande échelle : dans son schéma décennal de développement du réseau (SDDR) publié en 2019, RTE identifie pour l’autoconsommation un gisement technico-économique s’élevant à 40 GW à l’horizon 2035.Le développement de l’autoconsommation est aujourd’hui tiré à la fois :
- par les progrès technologiques qui accroissent la rentabilité de l’autoconsommation (baisse des coûts des panneaux photovoltaïques et de leur installation, augmentation de leur performance, outils de pilotage de la consommation, etc.) ;
- par la volonté croissante, mais difficilement quantifiable, des utilisateurs de devenir responsables de leur consommation. Cette volonté se traduit principalement par une démarche favorisant la production locale, les circuits courts, en essayant de piloter et d’éventuellement réduire sa consommation. L’autoconsommation peut par ailleurs être considérée comme une manière de se prémunir d’un risque d’augmentation du prix de l’électricité. La recherche d’une plus grande autonomie que traduit l’autoconsommation ne doit toutefois pas être associée à une autosuffisance totale vis-à-vis du réseau, voire à une autarcie. En effet, au moins en France, les autoconsommateurs ont besoin d’une garantie d’accès au réseau et d’un contrat avec un fournisseur pour leur fournir l’énergie consommée en complément de leur production locale, ne serait-ce qu’en cas de défaillance de leur installation de production.
3. Le modèle économique de l’autoconsommation
Lorsque le coût de production à partir de l’installation de production locale (dans la grande majorité des cas d’origine photovoltaïque) est inférieur au prix TTC de fourniture d’électricité, le critère dit de « parité réseau » est atteint.
Dès lors, le modèle économique de l’autoconsommation consiste à minimiser ses soutirages nets et la facture de fourniture associée, en dimensionnant son installation de production et en ajustant sa consommation, afin de maximiser ses taux d’autoproduction et d’autoconsommation.
La rentabilité d’une opération d’autoconsommation pour le porteur de projet, notamment comparativement à une opération dans laquelle l’intégralité de la production est revendue à un tiers, dépend du contexte économique, fiscal et régulatoire en vigueur.
Plus spécifiquement, pour un consommateur, la rentabilité de l’autoconsommation et le choix d’investir dans une installation de production dans ce contexte dépendent notamment :
- du coût de la production photovoltaïque, qui est essentiellement un coût d’investissement ;
- du prix TTC du mégawattheure vendu par son fournisseur, qu’il peut économiser en autoconsommant ;
- des dispositifs de soutien en vigueur : tarif de revente des surplus injectés sur le réseau, mais également prime à l’investissement ou exonération de taxes sur l’électricité autoconsommée (CSPE et TICFE) ;
- du taux d’autoconsommation et du taux d’autoproduction.
La rentabilité de l’autoconsommation s’améliore lorsque les taux d’autoconsommation et d’autoproduction augmentent, ce qui incite l’autoconsommateur à synchroniser sa consommation et la production de son installation. Elle peut en particulier être d’ores et déjà rentable dans le secteur tertiaire, par exemple sur les toitures de parkings de centres commerciaux, où la consommation est principalement située dans la journée.
Enfin, du point de vue du système électrique, l’autoconsommation apporte des bénéfices lorsqu’il est moins coûteux de produire localement que de produire de manière centralisée puis d’acheminer l’électricité, ainsi que lorsque les efforts de l’autoconsommateur pour synchroniser sa consommation et sa production conduisent à moins utiliser le réseau dans les périodes où il est chargé. Il importe, de ce point de vue, de distinguer la parité réseau de la « parité système », ou « parité à la prise » : celle-ci est atteinte lorsque le coût de production locale est inférieur à la somme du coût de production par des moyens de production centralisée et du coût d’acheminement de l’électricité. Si pour une installation d’autoconsommation donnée, la parité réseau est atteinte, mais pas la parité système, alors l’autoconsommateur réalise un gain à son périmètre (notamment sur les taxes assises sur l’énergie consommée évitées), mais génère dans le même temps un surcoût pour l’ensemble du système électrique. Des effets redistributifs, certes minimes à ce jour, peuvent ainsi être générés par l’autoconsommation.
4. L’autoconsommation collective
L’autoconsommation peut également être collective. Dans cette configuration, un ou plusieurs producteurs et des consommateurs à proximité, nécessairement équipés d’un compteur évolué, sont liés entre eux par une personne morale organisatrice, qui signe une convention d’autoconsommation collective avec Enedis ou un autre gestionnaire de réseau de distribution (GRD).
Sur chaque pas de mesure, l’énergie localement produite est affectée aux différents consommateurs selon des coefficients de répartition déterminés par la personne morale organisatrice et transmis au GRD, sur la base desquels le GRD retraite les courbes de charges de chaque consommateur.
Chaque consommateur participant à une telle opération doit par ailleurs disposer d’un contrat de fourniture avec le fournisseur de son choix, auquel sont transmises les données de consommation retraitées de la production locale. Le fournisseur est en charge de fournir à son client l’énergie consommée en sus de celle issue de la production locale qui lui est attribuée. Par ailleurs, la production locale qui n’est pas consommée par les participants est réinjectée sur le réseau public de distribution et peut être valorisée par le(s) producteur(s).
Les transits d’électricité liés à ces opérations font l’objet d’une tarification des réseaux dédiée, visant à refléter le fait que seul le réseau basse tension est sollicité par ces flux.
Ces opérations sont notamment portées par des collectivités locales, des particuliers ou encore des bailleurs. La valorisation des flux locaux étant de la responsabilité des personnes morales organisatrices, de telles opérations peuvent avoir une portée sociale, en affectant par exemple à moindre coût, voire gratuitement, la production locale aux consommateurs précaires au sein d’un logement social. A ce titre, l’article 41 de la loi du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat[1], facilite la réalisation de telles opérations en permettant aux organismes d’habitations à loyer modéré de créer, gérer et participer à des opérations d’autoconsommation collective d’électricité et de jouer le rôle de personne morale organisatrice de ces dernières[2]. Enfin, les opérations d’autoconsommation collective peuvent constituer un véhicule efficace pour sensibiliser les habitants d’un bâtiment ou d’un quartier à leur consommation d’énergie et les inciter à entreprendre par exemple des actions d’efficacité énergétique. Même si elle ne constitue qu’un schéma organisationnel, qui ne modifie pas la substance des flux physiques, l’autoconsommation permet ainsi de stimuler le déploiement de la filière photovoltaïque en milieu résidentiel et d’impliquer les citoyens dans le système électrique.
Au premier trimestre 2020, 28 opérations d’autoconsommation collective sont en fonctionnement en France, et une vingtaine sont déclarées en projet.